Art populaire vietnamien traditionnel – le chant ca tru a été inscrit en 2009 par l’UNESCO sur la liste du patrimoine immatériel nécessitant une sauvegarde urgente. Art pluri centenaire alliant la poésie à la musique, il renait aujourd’hui de ses cendres, après avoir failli sombrer dans les oubliettes de l’Histoire.
Le chant Ca Tru – Origine et court historique
Pour les chercheurs et les historiens, le Ca tru aurait une origine religieuse. Pour étayer leurs dires, ils s’appuient sur les annales historiques de la province de Hung Yen. Ces dernières rapportent l’histoire d’une certaine Mme Dao Thi Hue, qui a utilisé sa beauté et son talent de chanteuse pour séduire et tuer les ennemis Ming. Les gens ont plus tard construit un temple appelé Dao Nuong en commémoration. D’autre part, les érudits font remonter ses origines à un type de chant féminin connu sous le nom de hat a dao, qui était largement interprété comme une expression de culte pendant la dynastie Ly (1010-1225). Il semblerait qu’au départ forme de divertissement royal connu sous le nom de Hat Khuon, le Ca tru a prospéré au 15ème siècle, puis, au fil du temps, est progressivement devenu populaire au point d’être joué dans les maisons communales, les auberges et les maisons privées. Il prend le nom de Ca tru et devient une forme courante de divertissement jusqu’au 20ème siècle, dans le Nord du Pays. D’ailleurs, la rue Kham Thien à Ha Noi était réputée pour ses représentations de Ca tru.
Cependant, après 1945, Ca tru a bien failli s'éteindre. Faisant un peu penser aux Geishas, les chanteuses de ce qui a été appelé à l’epoque Co Dau - joué par une seule femme - ont été associées à la prostitution et à la dégradation des femmes. En fait, c’était un peu plus complique que ça, mais c’est une autre histoire…
En 2005, Ca tru a été soumis à l'UNESCO pour être reconnu comme chef-d'œuvre du patrimoine culturel oral et immatériel, ce qui sera acté en 2009. Depuis, il revit, avec la création de nombreux clubs dédies. Hanoi dénombre près de 20 groupes et clubs, dont le plus connu est le Hanoi Ca tru Club, qui ouvre le dernier dimanche de chaque mois au temple Bich Cau Dao Quan, près du temple de la littérature. C’est ce même club qui a créé et lancé le festival annuel de Ca tru, qui rassemble de nombreux artistes des Provinces voisines, notamment Hung Yen – considérée comme le berceau du Ca tru – et Dong Mon, près de Hai Phong, autre haut lieu de cet art ancestral. Et enfin, rappelons que les villageois de Lo Khe dans le district de Dong Anh - l'un des berceaux de l'art - organisent également chaque année des festivals le 6e jour du 4e mois lunaire et le 13e jour du 10e mois lunaire. En participant à ce festival, vous pouvez voir les chanteurs locaux des plus jeunes aux plus âgés, et pourquoi pas en profiter pour vous asseoir en cercle et participer à une cérémonie pour vénérer les fondateurs de ca tru.
Ca tru, se traduit littéralement par « chansons de carte de pointage ». Cela fait référence aux cartes en bambou achetées par les hommes lorsqu'ils visitaient les auberges où se jouait le Ca tru. Pour payer la performance, le public donnait à la chanteuse des cartes en bambou ; le nombre de cartes correspondait au montant d'argent que l’artiste recevrait. C’est pourquoi Ca tru est aussi traduit par « chanson de la récompense ». C’étaient les mandarins et autres fonctionnaires qui appréciaient le plus ce type de divertissement, se régalant de la performance des talentueuses jeunes femmes, qui non seulement chantaient, mais avec leur connaissance de la poésie et des arts, pouvaient engager une conversation pleine d'esprit tout en servant à manger et à boire. Vous comprenez maintenant pourquoi Ca tru a été associe aux Geishas…
Comment se déroule une représentation de Ca tru
Ca tru a de nombreuses formes, chacune remplissant des fonctions sociales différentes : on distingue notamment les chants de dévotion, les chants de divertissement, les chants interprétés dans les palais royaux et ceux interprétés lors des concours de chant. Le ca trù possède 56 formes musicales ou mélodies différentes, chacune appelée the cach. Mais le Ca trù le plus couramment joué fait intervenir au moins trois interprètes : une chanteuse, responsable… du chant tout en jouant du phach (un morceau de bambou frappé avec deux morceaux de bois) tandis qu’un musicien l’accompagne au dan day (un luth à long manche avec trois cordes en soie et 10 frettes). Parmi les auditeurs, un connaisseur (souvent un érudit ou l'auteur de la chanson) suit attentivement le chant, la cadence du phach et du luth. Quand il trouve un passage à son gré (ou pas…), il frappe avec une baguette plusieurs coups secs sur le trong chau (tambour d’éloge). Plus rarement, certaines représentations de ca trù comprennent également de la danse.
L'art du spectacle de ca tru est assez compliqué, exigeant de la chanteuse qu’elle soit à la fois hautaine et élégante dans ses gestes, mais non moins sentimentale. Elle doit maitriser à la perfection les techniques respiratoires qu’impliquent les vibratos.... Sans parler de l’importance du battement du Phach, complexe, sophistiqué, capable à lui seul d’exprimer une multitude d’émotions.
Câu Lạc Bộ Ca Trù Hà Nội / Hanoi Catru Club est un théâtre dédié aux représentations de Ca tru. Il est situé à Hanoi, au 42 pho hang Bac dans le quartier de Hoan Kiem. Si vous êtes dans la Capitale, n’hésitez pas à contacter une agence de voyage basée sur Hanoi pour en savoir plus et réserver vos billets.